A la rencontre d’Olive Nindamutsa, l’unique camerawoman de la RTNB

Olive Nindamutsa est la seule femme cadreuse à la RTNB depuis 15 ans. Elle figure parmi les rares femmes camerawomen dans le secteur médiatique burundais. Ce métier a été pendant de longues années réservé aux hommes. Mère de trois enfants, la quadragénaire se dit fière de ce métier bien que les défis ne manquent pas.
Portrait
Olive Nindamutsa entre dans le secteur médiatique en 2000. Elle débute à la radio Bonesha FM, comme ingénieure du son. Pendant cette période, peu de femmes s’intéressent aux métiers dits « réservés aux hommes ». Elle est de ces rares filles électriciennes de formation. Elle a étudié l’Electricité Industrielle à l’ETS Kamenge depuis la 7ème année.
De la radio Bonesha à la TV nationale en passant par la radio nationale
Après 5 mois à la radio Bonesha, Olive Nindamutsa est recrutée à la Radio-Télévision Nationale du Burundi(RTNB). Elle intègre d’abord la radio nationale comme ingénieure du son. Très jeune et forte physiquement, elle travaillait à la fois à la radio Bonesha et à la RTNB. « A la cabine technique, c’est facile de permuter avec un autre technicien : il travaille pendant votre tranche et vous travaillez pendant la sienne. A la radio Bonesha, il y avait d’autres techniciens qui travaillaient dans d’autres organisations, la pratique était courante », explique-t-elle.
En 2007, elle demande d’être transférée à la télévision nationale. Les conditions de travail étaient dures pour une femme mariée et mère : « On se levait très tôt (3 00 du matin) pour aller lancer à 5 h00 les émissions radiophoniques. Cela est difficile quand on a des enfants tout jeunes ».
Un stage en Egypte lui donne l’opportunité d’apprendre la camera
Après une réponse favorable à sa demande de transfert à la télévision nationale, elle bénéficie directement d’un stage de trois mois en Egypte et c’est là où elle entre en contact avec la caméra. « Nous avons étudié les techniques de caméra, de montage, de rédaction des papiers, etc. », précise-t-elle, ajoutant que de retour d’Egypte, elle sera affectée au service caméra.
Les débuts n’ont pas été faciles pour elle. « Parmi les techniciens qui prestaient dans ce service, j’étais la seule femme, avec peu d’expérience sur le terrain. Les techniciens ont quelques secrets qu’ils n’aiment pas révéler à leurs collègues de peur d’être dépassés en compétences », révèle Mme Nindamutsa.
Mais avec le temps, Olive parvient à s’en sortir parfaitement bien. Actuellement, la camerawoman à la TV nationale affirme être aussi capable que les hommes. Cette quadragénaire a déjà fait des reportages à l’étranger comme en France, Gabon, Ethiopie, Tanzanie, Guinée Equatoriale, Ouganda, Somalie, et bien d’autres pays.
Fière de son métier et primée par le Président de la République
Olive Nindamutsa déclare vivre de ce métier dont elle fière. « Arriver à la maison, regarder les images que j’ai prises ou dire aux enfants que ce sont mes images me fait plaisir », se réjouit-elle. En 2020, lors de la célébration de la journée dédiée aux femmes, Mme Nindamutsa a été primée par le Président de la République feu Pierre Nkurunziza pour son dévouement, à un travail réservé aux hommes.
Les exigences du métier et celles d’une épouse et mère figurent parmi les défis de ce métier pour une femme
Interrogée au sujet des défis de ce metier, elle pointe du doigt les exigences du métier : « Il y a des fois où tu te présentes et on t’affecte sur le terrain dans une autre province alors que tu n’as pas apporté un kit de toilette minimal dans ton sac à main ». Par ailleurs, lorsque les camerawomen sont enceintes, Il y a des terrains difficiles pour les femmes enceintes. Tu ne peux pas te tenir debout pendant longtemps ».
Le manque des formations pour renforcer les capacités en techniques de camera dans cette institution est un autre défi. Mme Nindamutsa évoque également la préoccupation du travail domestique. « Etre cameramen à la RTNB, tu ne sais pas à quelle heure tu vas rentrer. Tu rentres souvent tard alors que dans la société burundaise, c’est la femme qui doit s’occuper du ménage. Cette indisponibilité en famille crée un déséquilibre entre la vie en famille et le travail », fait-elle remarquer. Le port des matériels comme la camera pendant plusieurs années finit par produire un mal de dos. A cela s’ajoutent des propos décourageants dans l’entourage. « Nombreuses personnes m’ont découragé, me disant que ce métier n’est pas pour les femmes. Mais c’est une question de passion. Si ce n’était pas cela, j’aurais abandonné ».
Malgré ses 15 ans de services à la camera, Olive Nindamutsa reste la seule femme cadreuse à la RTNB. En dépit de multiples encouragements et sensibilisations de la part des chefs hiérarchiques de la RTNB, ses collègues femmes journalistes restent réticentes à affronter la camera. Olive Nindamutsa conseille aux femmes en général et aux jeunes filles en particulier de braver les préjugés et s’intéresser au métier de preneur d’images.